Dans la nuit du lundi 6 mars au mardi 7 mars 2017 des malfaiteurs se sont introduits dans le Domaine de Thoiry malgré les mesures de sécurité mises en place et ont tué l’un des trois rhinocéros blancs pour s’emparer de l’une de ses cornes. L’ensemble du personnel est extrêmement choqué. Une enquête de gendarmerie a été diligentée dès les premières heures de la matinée. La direction du Domaine de Thoiry va porter plainte.
LES FAITS
Les malfaiteurs sont entrés au Domaine de Thoiry en forçant l’une des grilles extérieures proches de la Plaine africaine. Ils se sont ensuite dirigés vers le bâtiment des rhinocéros blancs dont ils ont forcé la porte métallique et ont fracturé une porte intérieure intermédiaire. Cela leur a permis d’accéder aux loges des animaux.
Ils ont alors tué par balle Vince un jeune mâle de 4 ans pour couper l’une de ses cornes, probablement à la tronçonneuse. Sa seconde corne n’a été que partiellement tranchée ce qui laisse imaginer que les criminels ont été dérangés ou que leur matériel s’est révélé défectueux.
Les deux autres rhinocéros blancs vivant à Thoiry, Gracie âgée de 37 ans et Bruno âgé de 5 ans, ont échappé au massacre et sont sains et saufs.
Vince a été trouvé ce matin par sa soigneuse qui, très attachée aux animaux dont elle s’occupe, est profondément affectée. Cet acte odieux a été perpétré malgré la présence de cinq membres du personnel zoologique vivant sur place et de caméras de surveillance.
LE CONTEXTE
Les cornes de rhinocéros font l’objet d’un commerce illégal car on leur prête des propriétés médicinales infondées. En 2015 sur le marché noir, 1kg de corne de rhinocéros était vendu 51 000 euros. Il existe 5 espèces de rhinocéros et 11 sous-espèces, toutes menacées.
Vince est né fin 2012 au Burger’ Zoo d’Arnhem aux Pays-Bas. Il est arrivé en mars 2015 au Domaine de Thoiry. Il appartient à la sous-espèce rhinocéros blanc du Sud qui, après avoir frôlé l’extinction au 19ème siècle (seulement 20 à 25 animaux dans la nature), a vu ses effectifs remonter jusqu’à atteindre un peu plus de 20 000 individus dont 18 000 se trouvent en Afrique du Sud. Il s’agit donc d’une sous-espèce extrêmement menacée pour laquelle la reproduction et la conservation en parcs zoologiques et sur le terrain est essentielle. 250 rhinocéros blancs du Sud sont actuellement hébergés dans les zoos européens et font l’objet d’un programme d’élevage.
Ces dernières années le braconnage en Afrique du Sud a connu une hausse exponentielle. En 2007, 13 rhinocéros blancs ont été tués, en 2011, 448 rhinocéros blancs, en 2014, 1 215 et en 2015, ce sont 1 175 rhinocéros blancs qui ont été braconnés. Le 21 février dernier, l’orphelinat dédié aux rhinocéros de Thula Thula en Afrique du Sud a été attaqué. L’équipe a été sérieusement molestée et plusieurs jeunes rhinocéros tués.
Les vols de cornes de rhinocéros sont également en recrudescence à travers l’Europe. Il s’agirait cependant de la première fois qu’un zoo subit une attaque entraînant la mort d’un rhinocéros.
© Arthus Boutin / Domaine de Thoiry
Très impliqué dans la sauvegarde des animaux et leur protection, le Domaine de Thoiry avait déjà, à sa façon, tiré la sonnette d’alarme en organisant en 2013 une conférence portant sur le trafic de cornes de rhinocéros. Différents spécialistes du rhinocéros et de la faune sauvage y avaient participé dont la Direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières (DNRED), la Direction de la nature et des paysages du Ministère de l’Écologie, du Développement Durable et de l’Énergie (MEDDE), la Brigade CITES – Capture de l’Office National de la Chasse et de la Faune Sauvage (ONCFS), le Président de l’African Rhino Specialist Group de l’Union International pour la Conservation de la Nature (UICN), le responsable TRAFFIC pour le World Wildlife Fund (WWF).
En France, un arrêté, publié le 17 août 2016 au Journal officiel, interdit «sur tout le territoire national et en tout temps» le transport à des fins commerciales, le colportage, l’utilisation commerciale, la mise en vente, la vente ou l’achat de défenses et d’objets composés en tout ou partie d’ivoire des espèces d’éléphants ou de corne de rhinocéros. Cet arrêté concerne toutes les espèces d’éléphants (d’Afrique et d’Asie) et de rhinocéros (blanc, noir, indien, de Sumatra et de Java). Des dérogations à cette interdiction sont toutefois prévues. Ces dérogations concernent le commerce des antiquités (objets travaillés datant d’avant 1947), «actuellement libre de documents Cites, au cas par cas», a précisé le ministère de l’Environnement. Le commerce et la restauration d’objets travaillés datant d’après mars 1947 et d’avant le 1er juillet 1975 restent également possibles, «sous réserve d’avoir obtenu préalablement, au cas par cas, le certificat intra-UE (CIC) prévu par le règlement Cites». Le trafic d’espèces sauvages et de leurs produits est sévèrement puni par la loi en France.
Le trafic d’espèces sauvages protégés représente le 4ème trafic au monde après celui de la drogue, de la contrefaçon et celui d’êtres humains.
Sources des informations chiffrées
IFAW – WWF – Save the Rhino – IUCN RedList